Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/07/2010

Quatre soeurs (M. FERDJOUKH)

Quatre soeurs.jpg« Parfois, Enid aurait aimé avoir moins de soeurs. »

Enid est la benjamine des sœurs Verdelaine. Elle a neuf ans, vit avec ses quatre sœurs dans la Vill’Hervé depuis que leurs parents sont décédés dans un accident de voiture et évolue dans un univers peuplé de TOCS  (dix-sept pas séparent la maison de l’arrêt d’autobus), de personnages aussi étranges  qu’une chauve-souris, un écureuil, un fantôme musicien ; elle parle aussi régulièrement à ses parents, qui ont la manie de surgir n’importe quand. A part ça, c’est une petite fille tout à fait normale, heureuse, malicieuse, peste à ses heures. Parce que la vie n’est pas facile quand on est la dernière…

Hortense quant à elle est l’avant-dernière des filles Verdelaine. Elle a onze ans, passe son temps à lire et à écrire son journal. Mais son rêve secret, c’est de devenir actrice. Heureusement, une rencontre inattendue avec Muguette en haut d’une falaise va décider de son destin…

Bettina, c’est la peste. Quatorze ans, la seule des cinq sœurs à avoir SA salle de bain, qu’elle occupe à longueur de temps (quand elle ne lit pas Futile ou qu’elle ne regarde pas le deux-centième épisode de Cooper Lane), elle ne se déplace jamais sans ses deux inséparables copines (Béhotéguy et Denise). Mais quand elle va rencontrer – enfin- l’amour, il ne ressemblera pas à ce qu’elle attendait…

Enfin l’été verra l’épanouissement de la plus effacée des sœurs, la plus dévouée et… la plus passionnée : Geneviève. Celle qui lave plus blanc que blanc, celle qui ressemble à Marilyn Monroe quand elle met des talons, celle qui pratique la boxe thaï en faisant croire qu’elle fait du baby sitting. Seize ans, un petit boulot de vendeuse de glace pour l’été et un premier grand amour au parfum du danger…

Difficile de résumer l’esprit qui règne dans ce roman : tour à tour profondément ancré dans le quotidien et subitement filant vers la fantaisie la plus débridée. L’univers est celui de tout le monde : c’est celui de l’enfance, de cette époque où l’on se régalait des aventures du Club des Cinq (et Enid sait à merveille, à l’instar de son illustre homonyme, nous entraîner dans des souterrains et des puits enfouis), où l’on chantait à tue tête devant Peau d’Âne préparant sa galette et regardant sortir le poussin de l’œuf cassé, mais c’est aussi celui du chagrin et de la perte (les cinq sœurs Verdelaine ont perdu deux ans plus tôt leurs parents dans un accident d’automobile).

Les noms sont improbables, les situations cocasses, Malika FERDJOUKH semble avoir un sérieux penchant pour les bras-cassés, les fêlés qui, comme le dit si bien Anna Gavalda, « laissent passer la lumière » et l’on ressort de cette lecture avec un large sourire aux lèvres et l’envie d’ouvrir sa porte pour laisser entrer le soleil.

- Est-ce que je peux dire encore un truc ? réclama Enid. La deuxième chose que je préfère, c’est quand je dis que je m’appelle Julia.

Charlie parut scandalisée.

- Tu as honte de ton prénom ? celui que ta mère et ton père t’ont choisi pour la vie ?

- La vie, c’est long.

- Vous savez bien que c’est le hasard s’ils m’ont appelé Enid.

C’était vrai. Dans la chambre de la clinique où Mme Verdelaine exhibait fièrement son nourrisson anonyme, M. Verdelaine énumérait le dix millième prénom du Dico des Prénoms. Aucun ne leur plaisait. Lucie Verdelaine avait alors formulé une espèce de vœu :

- Le premier prénom de fille qui sera prononcé dans cette chambre sera celui de ce bébé sans nom.

Il s’écoula quelques heures et quelques visites durant lesquelles Lucie et Fred épièrent phrases et paroles. Elle avait eu quelques sueurs froides lorsqu’on lui apporta le dernier best-seller de Myrtille trouvé. Mais le prénom ne fut pas prononcé.

Arriva le moment où Charlie, qui passait voir sa mère en sortant du lycée, alluma la télé à la seconde où un homme braillait sur l’écran : « j’en parlerai à Enid, ma femme. » Il s’agissait d’un film avec Jerry Lewis et Dean Martin. Lucie avait regardé Fred. Et vice-versa. En chœur ils avaient lancé :

Charlie, voici ta sœur Enid !

Charlie n’avait pas été étonnée outre-mesure. Elle-même devait son prénom à l’héroïne de L’ombre d’un doute. La boucle se bouclait.

Malika FERDJOUKH, Quatre sœurs.

Médium – Ecole des loisirs

608 pages – 19,50 €

Paru en 2010

NB : quatre romans portant chacun le nom d’une des sœurs ont été publié en 2003 et sont désormais réunis en un seul.

L’auteur : Malika Ferdjoukh est née à Bougie, en Algérie, en 1957. Elle vit à Paris et a travaillé dans un hôpital d'enfants avant de se lancer dans l'écriture. Elle écrit des romans pour la jeunesse, ainsi que des scénarios pour la télévision.

Un autre extrait : le mille-feuilles de petits-beurre aux spéculoos